JULES JANSSENS , LE DÂNESH-NÂMEH d'IBN SÎNÂ : UN TEXTE À REVOIR ? Bulletin de Philosophie Médiévale (Louvain-la-Neuve) volume: 28 (1986), pp. 163-177.

 

English Abstract

 

In this study, Author first points out that a number of paragraphs of the metaphysical part of the Dânesh-Nâmeh have their exact Arabic counterpart in the Taclîtqât, which seems to indicate the existence of an original Arabic work by Ibn Sînâ himself (it seems less probable that Ibn Sînâ would have translated parts of his Dânesh-Nâmeh into Arabic).

In the second part of the study, Author describes in detail the close resemblance, which can be shown to exist between the Dânesh-Nâmeh, and al-Ghazzâlî’s  Maqâsid al-falasifa, Intentions of the philosophers. Since author did not discover many important omissions and only found minor additions (most of the time concrete examples, which are clearly intended to render the text more accessible), Author concludes that the Maqâsid al-falasifa is a slightly interpretive translation of the Dânesh-Nâmeh. Moreover, in view of the much more logical order of al-Ghazzâlî version Author wonders whether the actual text of the Dânesh-Nâmeh (notwithstanding the manuscript evidence!) has been written as such by Ibn Sînâ himself.

 

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IV, 3. - LE DÂNESH-NÂMEH d'IBN SÎNÂ : UN TEXTE À REVOIR ?

Quelques considérations a propos de la découverte d'un original (partiel) (dans les Taclîtqât) et d'une traduction (interprétative?) (les Maqâsid d'al-Ghazzâlî) arabes.

 

Le Dânesh-Nâmeh [1] d'Ibn Sînâ se. révèle un écrit philosophique particulier à plus d'un égard. Il se distingue d'abord par la langue utilisée, le persan moderne- étant ainsi, si pas le premier, au moins un des premiers textes du genre philosophique écrits en cette langue ; par sa division générale -l'étude de la métaphysique y précède celle de la physique et des mathématiques ; enfin, par son caractère hautement abstrait et synthétique -ce qui le révèle comme une encyclopédie foncièrement philosophique. Ces particularités ne rendent évidemment pas faciles ni l'interprétation, ni l'édition ou la traduction de cette oeuvre. Par conséquent, toute indication pouvant contribuer à une meilleure compréhension vaut la peine d'être examinée en détail.

Nous croyons en avoir découvert deux. Il s'agit d'abord de ce qui fut probablement la première rédaction, faite par Ibn Sînâ lui-même, de la partie métaphysique du Dânesh-Nâmeh, au moins de quelques fragments qui en ont été conservés. Ce 'brouillon' fut rédigé par lui en langue arabe, et se retrouve dans ses Taclîtqât [2] Glosses (concernant la métaphysique et la psychologie d'Aristote). En second lieu, nous croyons pouvoir affirmer que les Maqâsid al-falasifa [3], un texte d'attribution certaine à al-Ghazzâlî, ne [p.163] contiennent nullement un résumé par celui-ci des grandes thèses philosophiques développées avant lui -comme la majorité des commentateurs a cru jusqu'à maintenant [4]-, mais tout simplement une traduction, bien de par sa main, en arabe de ce même Dânesh-Nâmeh d'Ibn Sina. Celle-ci ne s'avère pas littérale, mais elle respecte néanmoins l'essentiel du contenu -ainsi la meilleure qualification nous paraît être celle de 'traduction interprétative'. Démontrons maintenant les données concrètes de cette double 'découverte'.

Signalons d'abord les parallèles existent entre les Taclîtqât et le cIlm Ilâhî du Dânesh-Nâmeh.

Dânesh-Nâmeh                 Taclîtqât

§ 9                                           1741. 18-175 1.9

20                                        176 1. 12-177 1.5; 177 1. 19-178

                                             1. 24; 179 1. 8-13

21                                        181 1. 5-12; 182 1. 9-16

22                                        182 1. 16- 183 1.8

23                                        185 1. 22-23

24                                        184 1. 28 -185 1.7

25                                        186 1. 8- 187 1. 12 [p.164]

26                                        187 1. 16- 188 1. 15

27                                        188 1. 16- 189 1. 5

28                                        189 1. 6-21

29                                                                                189 1. 24 - 190 1. 26 ; 192 1. 11-16

30                                        193 1. 5-15

32                                        13-14 1. 2 ; 14.1. 27- 15 1. 9

33                                        16 1. 10 -17 1. 4 ; 18 1. 8-17 ;

                                             18,1. 23-19 1. 14

34                                        19 1, 15- 20 1. 10

35                                        20 1. 23- 21 1. 3 ; 21 1. 19- 22

                                             12

36                                        22 1. 3-9.

Précisons en toute honnêteté que dans certain de ces cas, il vaut mieux parler de paraphrase que de traduction littérale, ainsi pour les paragraphes 23, 24, 27 et 29, le début des paragraphes 20 et 32, le milieu du paragraphe 33 et la seconde moitié du paragraphe 35.

Mais n'est-il pas alors péremptoire, voire injustifié, de désigner ces quelques fragments des Taclîtqât comme ayant fait partie d'un original arabe?

Nous ne le croyons pas. Il est à remarquer qu'il s'agit bien de deux ensembles -les paragraphes 20 à 30 ainsi que 32 à 36- repris tels quels dans les Taclîtqât, p. 175-193 et 13-22, c'est-à-dire la fin et le début de l'édition actuelle. Ne peut-on pas en déduire raisonnablement qu'il y ait eu un glissement dans cette dernière, ou plus probablement dans la tradition manuscrite sur laquelle elle se base? A cette occasion, une partie -le paragraphe 31 et le tout début du paragraphe 32- se serait perdue, ce déplacement ayant été accompagné de la perte d'un ou de plusieurs folios. En plus, la présence d'un correspondant arabe au paragraphe 9 -et comme nous n'avons effectué qu'une première analyse asse hâtive, il se peut que certains parallèles nous aient échappé- ne fait qu'accroître la probabilité de l'existence d'un original arabe de le partie métaphysique entière à l'intérieur des Taclîtqât.

Remarquons d'ailleurs que l'édition récente de celles-ci par Badawi apparaît a première vue assez défectueuse. En effet, une comparaison plus détaillée entre la rédaction arabe et la persane, spécialement concernant les paragraphes 22 et 33, nous a révélé des fautes de lecture, par exemple, p. 17, 1. 1 khayr ann au lieu de wujûd ann ; p. 19, 1.2 na cqalu au lieu de naf calu ; des omissions, par exemple, p. 175 1.6 la catégorie de possession (ar. malaka , pers. mulk) a clairement été oubliée ; p. 183 1. 4 toute une phrase est tombée entre al-khâssa et fa-idhan ; voire des distorsions, par exemple, p. 17 1. 3 où la formulation actuelle arabe est incompréhensibile -une omission en est probablement la cause principale-, mais on se demande si l'ordre actuel des mots est bien correct ; p. 19 1. 2 wa-lâ jusqu'à 1. 3 nafi c est, tel quel, un passage entièrement superflu - à partir du persan on y attendrait quelque chose dans le genre de wa-in yakûn bi-shawq.

Il se peut que certaines de ces fautes soient à incriminer à des copistes anciens. Comme nous n'avons pas eu le temps de consulter des manuscrits, nous ne sommes malheureusement pas capables d'en fixer les limites exactes[5]. Toutefois, on ne peut s'empêcher de croire que M. Badawi a fait son édition un peu à la hâte -ce qui expliquerait e.a. l'absence d'un appareil critique, indiquant les variantes de lecture. Qu'elle reste dans l'ensemble encore assez honnête n'est probablement dû qu'à sa grande érudition, plutôt qu'à un examen minutieux de tous les manuscrits existants. Ainsi, elle est utile, mail à utiliser avec précaution.

Par contra, l'édition persane semble avoir été faite avec beaucoup plus de soin. Néanmoins, on y rencontre quelques fautes, mais très souvent d'ordre plutôt secondaire, bien qu'une correction plus fondamentale s'impose parfois, comme par exemple p. 75, 1. 9-10, où le sens requiert la lecture suivante : andar mâhiyya (au lieu de wujûb al-wujûd) wâjib al-wujûd wa-în mâhiyya wujûb al-wujûd (au lieu de wâjib-al-wjûd ast), ce qui est confirme par l'original arabe [p.166]  (Tacl., p. 183, 1. 2-3 bien qu'il n'y ait pas de correspondance littérale absolue).

Toutefois, le texte persan, tel qu'il est présenté actuellement (et qu'il a été conserve dans la majorité (totalité?) des manuscrits), frappe par un manque de logique assez évident dans le développement des idées. Ainsi, par exemple, dans la partie métaphysique, l'expose du retour à Dieu précède celui de la création.

Il est vrai qu'Ibn Sînâ a consciemment adopté une structure particulière pour cette oeuvre, comme nous l'avons indiqué au début. Mais cela ne nous semble pas justifier des déplacements aussi inhabituels qua celui que nous venons de mentionner. A notre grand étonnement, Ghazzâlî dans ses Maqâsid offre cet ordre naturel, tout en gardant la spécificité de la division générale. Qu'il s’y inspire largement du Dânesh-Nâmeh ne peut être mis en doute. Les deux écrits démontrent une très forte ressemblance quant au contenu. L'apport personnel de Ghazzâlî semble à première vue se limiter à l'ajout de quelques résumés et à la concrétisation de certaines idées très abstraites (souvent par le biais d'exemples). IL est a remarquer en plus qu'il évoque, sans émettre aucune réserve, quelques thèses philosophiques, qu'il qualifie partout ailleurs d'impies, comme par exemple l'éternité du monde, la résurrection de l’âme seule, on qu'il les évite scrupuleusement, comme par exemple la possibilité d'une vie 'imaginale' dans l' au-delà[6]. Tout ceci nous fait incliner vers l’hypothèse d' une traduction interprétative. Mais à quel degré elle est ainsi, dépend principalement de l'explication à donner aux différences d'ordre dans les deux exposés. Sont-elles dues à un remaniement par Ghazzâlî lui-même, ou, par contre, s'expliquent-elles par une corruption dans la tradition manuscrite du Dânesh-Nâmeh à un certain moment de l'histoire? Ce qui plaide en faveur de la première alternative, c’est la présence d’autres remaniements -bien que d'envergure plus modeste-. Mais on peut [p.167] dénombrer plusieurs arguments à l'avantage de la seconde : 1. il est assez inconcevable qu'un esprit aussi brillant et systématique que celui d'Ibn Sînâ ait rédigé un texte si maladroitement structuré ; 2. l'ordre, retenu dans les Maqâsid, recoupe celui des grandes oeuvres avicenniennes hors du Dânesh-Nâmeh ; 3. une corruption dans la tradition manuscrite est bien concevable, quand on sait que Juzjânî le fameux disciple d'Ibn Sînâ, a reconstitué la partie mathématique, parce que, selon ses propres mots, il n'avait pas pu retrouver l'original[7]. Aucun de ces éléments n'a pourtant de valeur décisive. Ainsi, afin de pouvoir prononcer un jugement définitif, une analyse comparative et approfondie s'avère nécessaire. En attendant celle-ci [8], nous penchons -mais avec les réserves voulues- vers la dernière alternative.

Donnons maintenant un aperçu global des parallèles qui existent entre les Maqâsid et le Dânesh-Nâmeh. Pour faciliter la tâche du lecteur, nous signalerons à la fin de chaque partie, brièvement, les glissements les plus importants entre les deux textes, y ajoutant un premier essai d'explication.

 

(Pour les Maqâsid, nous nous référons a l’édition de S. Dunyâ).

I. Partie logique

Dânesh-Nâmeh                                   Maqâsid

§    1                                                 p. 33-37, 1. 13

2                                                     40, 1. 1-17

3                                                     40, 1. 18-41, 1. 7

4                                                     44-48, 1. 3

5                                                     48,1. 4-50, 1. 20 et p. 52, 1. 12-19

6                                                     50, 1. 21- 52, 1. 11

7                                                      41, 1. 8- 42, 1. 6

8                                                     53-54, 1. 7 [168]

9                                                     54, 1. 8-15

10                                                   55, 1. 16-17 ; 57, 1. 22-60, 1. 5

                                                        et 60, 1. 19- 61

11                                                    55, 1. 17-57, 1. 21 et 60, 1. 6-18.

12                                                   62-64, 1. 3

13                                                   64, 1. 4-65

14                                                   66, 1. 9-67, 1. 18

15                                                   67, 1. 19- 69

16                                                   70-72, 1. 12

17                                                    77, 1. 7- 80, 1. 6

18                                                   80, 1. 19- 83

19                                                   84- 86, 1. 8

20                                                   86, 1. 9- 87

21                                                   96-99, 1. 3

22                                                   88

23                                                   89 - 90, 1.4

24                                                   manque

25                                                   90, 1. 5- 95

26                                                   99, 1. 4 - 101

27                                                   102- 109

28                                                   110-112

29                                                                                                      122- 123, 1. 9

30                                                   123, 1. 10- 125, 1. 9

31                                                   127, 1. 12 -128, 1. 18

32                                                   125, 1. 10 -fin; 126, 1. 15- 127,

                                                        1. 11 et 129, 1. 4-fin 33 

                                                        120-121

34                                                   118-119

35                                                   113 - 117.

Les déplacements les plus importants à signaler sont : le § 7 (qui continue tout naturellement l'exposé du terme simple, entamé au § 3), le § 21 (sur les syllogismes composés, qui ressortent ici comme la réponse adéquate au raisonnement par analogie des dialecticiens) ; les § 33, 34 et 35 (dont l'ordre a été renversé, et qui ont été ainai placés entre les § 28 et 29 - le § 35, avec ses conseils contra le sophisme faisant logiquement [169] suite au § 28 sur la dialectique et le § 33 précédant aussi logiquement le § 29, car ce dernier n'offre qu'un complément de commentaire sur le syllogisme démonstratif proprement étudié dans le premier). En outre, on constate un double mélange : une première fois entre les § 10 et 11, une seconds entre les § 31 et 32 (nous ne pouvons pas entrer dans le détail ici, mais là aussi, cela s'avère souvent beaucoup plus logique), ainsi qua l'absence de l’équivalent d'un paragraphe, le 24, où il est question d'un raisonnement (faible!) par analogie (Ghazzâlî l’a peut-être, à cause de cela, jugé indigne d'un traité de logique).

II. Métaphysique

Dânesh-Nâmeh                                       Maqâsid

§   1                                                             134 - 137

2                                                             138- 140, 1. 16

3                                                             140, 1. 17- 143, 1. 6

4                                                             144 - 147, 1. 12

5                                                             154, 1. 16- 157, 1. 1

6                                                             147, 1. 13 - 154, 1. 15

7                                                              157, 1. 2-23

8                                                             158 - 162

9                                                             163 - 165

10                                                           166 - 170, 1. 15

11                                                            171 - 174, 1. 4

12                                                           174, 1. 5- 183, 1. 8

13                                                           183, 1. 9 - 187, 1. 12

14                                                           187, 1. 13- 189, 1. 2

15                                                           189, 1. 3 - 192

16                                                           193 - 200, 1. 3

17                                                            200, 1. 4 - 203, 1. 16

18                                                           203, 1. 17 - 205, 1. 11

19                                                           212, 1. 9- 213, 1. 7

20                                                           205, 1. 12- 209

21                                                           216, 1. 1-22

22                                                           213, 1. 8 - 215, 1. 17

23                                                           215, 1. 18 – fin [170]

24                                                           211, 1. 13 -212, 1. 8

25                                                           216, 1. 23 -219. 1. 13

26                                                           223 - 224, 1. 22

27                                                           219, 1. 14 - 222, 1. 2

28                                                           222, 1. 3 - 21

29                                                           225, 1. 9 - 229, 1. 12

30                                                           229, 1. 13 - 232, 1. 1

31                                                           232, 1. 2- 233, 1. 8

32                                                           233, 1. 9 - 234

33                                                           235 - 239, 1. 14

34                                                           239, 1. 15 - 240. 1. 22

35                                                           240, 1. 23 - 241, 1. 19

36                                                           241, 1. 20 - 242, 1. 11

37                                                           242, 1. 12 - 249

38                                                           288 - 290, 1. 8

39                                                           253 - 254, 1. 15

40                                                           254, 1. 16 - 255, 1. 4

41                                                           297, 1. 7 - 299, 1. 8

42                                                           255, 1. 5 - 256, 1. 12

43                                                           256, 1. 13 - 258, 1. 10

44                                                           258, 1. 11- 261, 1. 10

45                                                           261, 1. 11 - 267, 1. 2

46                                                           271, 1. 12 - 272, 1. 20

47                                                           272, 1. 21- 274, 1. 14

48                                                           275, 1. 5-20 et Fys., 318, 1. 11

                                                                319, 1. 4

49                                                           267, 1. 3 - 268, 1. 3

50                                                           268, 1. 4 - 270

51                                                           274, 1. 15- 275, 1. 4 et 275, 1.

                                                                21- 279, 1. 8

52-53                                                     279, 1. 9 - 283, 1. 16

54                                                           283, 1. 17 - 287

55                                                           290, 1. 10- 291, 1. 14

56                                                           291, 1. 15 - 293

57                                                           294 - 297, 1. 6 et 299, 1. 9- 300. [171]

Signalons et commentons les glissements suivants : le § 5 est déplace après le § 6 -ceci pourtant n'ayant aucune implication doctrinale ; le § 24, où il est question de l'essence de l'être nécessaire, est introduit immédiatement après la discussion sur l’être contingent (§ 20), tandis qua le § 19 (l’impossibilité pour un être nécessaire d'avoir une union essentielle avec quoi que ce soit) fait suite à ces deux §§ ; le § 26, qui parle en termes généraux des attributs de Dieu, as retrouve directement avant l'exposé détaillé de chacun d'eux ; le § 38, qui pose les fondements pour déterminer la hiérarchie des êtres, est lié intimement au § 55, contenant la description concrète du schéma émanatif ; de même que le § 41 (le bien et le mal en général) l’est au § 57 (la cause du mal dans les êtres corruptibles) ; les § 46 et 47, établissant la nécessite d'une âmemoteur en vue du mouvement circulaire des sphères célestes, arrivent après l'établissement de la nécessité d'un mouvement pour tout ce qui se renouvelle (§ 49-50). Un mélange de deux paragraphes (52-53) se note aussi dans cette partie de l'ouvrage. On remarque enfin qua le paragraphe 48, où il s'agit de la différence entre le premier corps et les corps corruptibles, se retrouve presque entièrement dans la partie physique, ce qui semble en fait plus logique, bien que sa présence dans la métaphysique puisse as défendre.

 

III. Physique

Dânesh-Nâmeh                                       Maqâsid

§    1                                                            303 - 304, 1. 12

2                                                            304, 1. 13 - 307, 1. 5

3                                                            307, 1. 6 - 308, 1. 2

4                                                            308, 1. 3 - fin

5                                                            309 - 311

6                                                            312 - 313, 1. 4

7                                                            313, 1. 5 - 315, 1. 2

8                                                            315, 1. 3 - 16

9                                                            315, 1. 17 - 316, 1. 24

10                                                         316, 1. 25 - 317, 1. 14

11                                                          317, 1. 15 – fin [172]

12                                                          322, 1. 12 - 323, 1. 5

13                                                          318 - 321, 1. 22

14 -15                                                   332, 1. 8 - 334

16                                                          323, 1. 6 - 20

17                                                          323, 1. 21 - 325, 1. 1

18                                                          325, 1. 2 - 4

19                                                          325, 1. 5 - 326

20                                                         330, 1. 15 - 332, 1. 7

21                                                          328, 1. 6 - 329, 1. 22

22                                                         321, 1. 23 - 322, 1. 21 et 327 -

                                                              328, 1. 5

23                                                         336 - 336, 1. 19

24                                                         336, 1. 20 - 338

25                                                         329, 1. 23 - 330, 1. 14

26                                                         339 - 342, 1. 13

27                                                          342, 1. 14 - 344. 1. 7

28                                                         344, 1. 8 - 345

29                                                         346 - 347. 1. 7

30                                                         347, 1. 8 - 349

31                                                          350 - 352, 1. 3

32                                                         353, 1. 23- 355, 1. 5

33                                                         352, 1. 4- 353, 1. 22

34                                                         355, 1. 6 - fin

35                                                         356 - 357, 1. 24

36                                                         357, 1. 25 - 358

37                                                          359 - 360, 1. 7

38                                                         360, 1. 8 - 362, 1. 5

39                                                         362, 1. 6 - 22

40                                                         362, 1. 23- 364, 1. 17

41                                                          364, 1. 18 - 367, 1. 21

42                                                         367, 1. 22- 368, 1. 22

43                                                         368, 1. 23- 370, 1. 9

44                                                         371 - 375

45-46                                                   376 - 378, 1. 19

47                                                          378, 1. 20 - 379, 1. 18 [173]

48                                                         379, 1. 19 - 380, 1. 17

49                                                         380, 1. 18 -382, 1. 6

50                                                         382, 1. 7 - 383, 1. 14

51                                                          383, 1. 15 - 385.

On premier grand changement dans l'ordre as produit après le § 11, qui termine le discussion sur le problème du lieu, spécialement celui de sa définition. Il est suivi ici d’une introduction générale sur les corps simples (§ 13), ainsi qua d'une introduction concernant l'influence de le nature d'une chose sur son lieu naturel (première partie du § 22). Alors on commence à parler de la froideur et de la chaleur (§ 12). Un second se situe après l'ensemble des § 16-19, dans lequel trois théories de l’échauffement sont présentées et réfutées. On y discute le différence entre la forme et les accidents des corps (§ 22, deuxième partie), le transformation des quarte éléments l'un en l'autre (§ 21), ainsi qua l'influence exercée par les corps lumineux (§ 25 -soleil et lune, suivi du § 20 -un discours complémentaire sur ce problème). Seulement après cela, il est question du lieu (naturel) que le corps simple possède (mélange des § 14 et 15).

Le déplacement du § 32 après le § 33 et le mélange des § 45 et 46 doivent aussi être signalés, mais sont sans aucune importance doctrinale.

Il nous semble qu'après cette mise en parallèle, les conclusions suivantes s'imposent (mais soulignons encore une fois qua parallélisme ne signifie pas ici traduction littérale)

1. L'ensemble du Dânesh-Nâmeh (ou presque) se retrouve dans les Maqâsid.

2. Ce dernier ne développe pas clairement des thèmes en dehors de ceux qui as trouvent dans le premier.

3. Ce dernier est du point de vue logique tellement mieux structuré, qu'on est naturellement incline a croire qua cet ordre as trouvait déjà chez Ibn Sînâ  lui-même.

En outre, une première comparaison plus détaillée entre les deux textes en ce qui concerne les § 22 et 33 de le métaphysique, [p.174] nous a démontré i suffisance que Ghazzâlî reste assez proche des idées d'Ibn Sînâ. On constate surtout un effort à rendre plus concret, et ainsi en même temps plus accessible, le texte hautement abstrait du Dânesh-Nâmeh. L'omission de quelques phrases (p.e. D.N. p. 95, 1. 9-10 et 1. 12-15), ou le création d'une perspective légèrement différente (comme p.e. à la fin du § 22) pourraient se comprendre dans la même ligne (mais indiquent aussi le caractère foncièrement non littéral), mais ce sont surtout les exemples concrets,, que Ghazzâlî a clairement ajoutés de sa propre main (p.e. p. 237, 1. 26 - 238, 1. 14 pour illustrer p. 95,1. 1 sqq. du Dânesh-Nâmeh), qui dévoilent sans ambiguïté cette tendance (comme le font d'ailleurs aussi les multiples résumés généraux).

C'est pourquoi nous croyons -et ceci est notre conclusion finale- que le texte actuel du Dânesh-Nâmeh est un texte à revoir, et donc à rééditer, en tenant compte aussi bien des Maqâsid de Ghazzâlî (pour l’entièreté), que des Taclîtqât (au moins pour une partie de la métaphysique)[9].

 

Appendice

IL nous a semblé intéressant de faire aussi une première évaluation des deux traductions contemporaines qui existent de la partie métaphysique, en tenant compte de la rédaction des Taclîtqât et de la traduction des Maqâsid. De façon globale, il s’est avéré que la traduction française de M. ACHENA et H. MASSÉ, Avicenna. Le livre de science. 2 vol., Paris, Les Belles Lettres, 1955-1958, t. I, p. 89-216 est assez fiable, mais maque souvent d'une précision absolve. L'anglaise, par contre, faite par P. MOREWEDGE., The Metaphysica of Avicenna (Ibn Sînâ). London, Routledge a. Kegan, 1973 (accompagnée d'un commentaire assez étendu) no semble guère satisfaisante bien qu'elle soit pour beaucoup de détails plus précise que la française. Il nous paraît que ce dernier a été la victime de ses propres idées préconçues à propos des lignes fondamentales suivies par Ibn Sînâ dans l'élaboration de cette oeuvre. Par conséquent, une révision des [p.175] deux est (plus que) souhaitable. Illustrons-en la nécessité par un petit extrait du § 33, concernant la volonté divine. Les lignes 7-9 de la p. 93 (va-har keh fa clî..bi-dânesh âyad) sont rendues par Morewedge, p. 66 : "If someone knows that an action results from him and his agentness (i.e. his awareness of his role as a knower), then that action becomes known due to him (i.e. due to the activity of his knowledge)". Le caractère hautement interprétatif de cette version anglaise se révèle immédiatement par les explications ajoutées entre parenthèses. Achena et Massé, par contre, offrent ostensiblement une lecture plus neutre : "Toute personae de qui procède un acte a conscience de cet acte et d'être cause de cet acte ; c'est (alors) l'acte procédant d'elle par science" (p. I, 160). Mais le terme 'cause' ne figure nulle part dans le texte persan. Déjà dans notre thèse de doctorat, Avicenna : tussen neoplatonisme en islam, 2 vol., Leuven, 1984, polyc., nous émettions ces critiques (p. II, 50, N. 106). Nous y proposions la traduction suivante : "Chaque fois qu'un acte procède de quelqu'un, et qu'il en est conscient, ainsi que de lui-même comme son auteur, cet acte procède de lui par science". Taclîtqât, p. 16, 1. 12-13 confirme l’essentiel de cette lecture (l'équivalent exact de ces lignes manque dans les Maqâsid) : annahu fâcilahu! (mais semble nécessiter le déplacement du keh après cli : tout acte, procédant de quelqu'un, et dont...).

Ceci n'est nullement un cas isolé. Plus loin, dans ce même chapitre, i.e. p. 94, 1. 10, on trouve tamâm hastî. Morewedge le traduit : "the complete realm of Being", tandis qu'Achena et Massé retiennent : "toute existence". Dans les deux cas, on doit inévitablement conclure à la présence de fortes tendances panthéistiques dans la pensée d'Ibn Sînâ. A partir du contexte, il est pourtant asses évident qu'il s'agit ici de la thèse (néoplatonicienne) que Dieu est parfait, voire le plus-que-parfait. Par conséquent, il faut lire : le parfait d'être (en arabe il ne se trouve que tâmm). D'ailleurs tout le contexte a été mal compris par Morewedge, qui poursuit [p.176] clairement une ligne plus intellectualiste que celle exprimée (au moins dans ce passage) par Ibn Sînâ.

Jules JANSSENS,

Leuven.

Note. M. ACHENA vient de publier une traduction révisée du Dânesh-Nâmeh. Paris, Les Belles Lettres, 1986. Nous n'avons malheureusement pas pu la consulter. [p.177]



[1] Ed. MO'IN-MESHKAT. Téhéran, 1953. Repr. Téhéran, Dekhoda B., 1975.

[2] Ed. A. BADAWI. Le Caire, 1973.

[3] Ed. S. DUNYA. Le Caire, 1961. La traduction latine médiévale fut éditée, en ce qui concerne les parties métaphysique et physique, par J. MUCKLE, Algazel's Metaphysics (sic!). Toronto, 1933, et, en ce qui concerne la partie logique, par Ch.H. LOHR, Logica Alghazalis. Introduction and critical text, in Traditio, 21 (1965), p. 223-290. On peut aussi consulter l'édition imprimée de Venedig, 1506. Repr. Frankfurt/Main, Minerva, 1969.

[4] Cfr. e.a. parmi les études récentes, celle de M. SHERIF, Ghazzâlî's Theory of Virtue. New York, SUNY, 1975, p. 4-5 ou celle de E. ORMSBY, Theodicy in Islamic Thought. The dispute over al-Ghazzâlî's "Best of all possible worlds". Princeton, New Jersey, Princeton Univ. Press, 1984, p. 84. N. SYEINSCHNEIDER. Die Hebraeischen Uebersetzungen des Mittelalters und die Juden als Dolmetscher. Berlin, 1893. Repr. Graz, Ak. Druck- u. Verlagsantalt, 1956. p. 311 avait pourtant déjà signalé une ressemblance forte avec la grande encyclopédie (i.e. le Shifâ') d'Ibn Sînâ, mais davantage: encore avec le petite (probablement référant ainsi à la Najât, plutôt qu'au Dânesh-Nâmeh). LOHR, Logica Algazalis... Introd., désigne par contre de façon non ambiguë le Dânesh-Nâmeh comme: source principale, mais il fait état d’une ré élaboration intelligente par Ghazzâlî. La même idée se trouve aussi dans l'introduction à le - traduction espagnole des Maqâsid, cfr. M. ALONSO, Maqâsid al-falâsifa o Intenciones de los filosofos. Barcelona, 1963, p. XLV- LII. Un lien étroit avec l'encyclopédie persane d'Ibn Sînâ avait donc déjà été reconnu avant nous. Si néanmoins nous parlons de 'découverte', c'est par rapport an caractère de ce lien : en premier lieu traducteur, et non interprétatif!

[5] Mr. J. MICHOT, qui a pu consulter plusieurs manuscrits, nous a confirmé l'existence de lacunes importantes dans l’édition Badawi (communication orale). Noun l'en remercions.

[6] La seule omission importante, qu'une première lecture nous a révélée, est l'absence de la notion d'intellect saint (caql al-qudsi) dans la Physique (§ 51 du Dan. Nam.).

[7] Cfr. M. ACHENA et H. MASSÉ, Avicenne. Le livre de science. II. Physique, Mathématiques. Paris, Les Belles Lettres, 1958, Préf. p. 6.

[8] Nous espérons pouvoir l'effectuer dans un avenir prochain.

[9] L'inverse est, bien sûr, aussi vrai!


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